mardi 14 octobre 2008

La 1256éme heure...
Te souviens tu ma Douce de notre première nuit? Non, même pas notre première nuit, notre premier bruit...Celui strident et anecdotique de la fenêtre msn de l'écran qui s'allume, s'agite. Ce premier bruit de toi à moi qui, de sa banalité, de sa pauvre petite médiocrité virtuelle, nous faisait accourir de l'autre bout de l'appartement et nous posait devant l'écran froid. Écran où on se dessinait à coup de mots, de maux.


J'y repense soudain cet après midi. En fait, j'y repense souvent. Pas toujours l'après midi d'ailleurs. Ça prend comme ça, par hasard, n'importe où, quand on joue a être n'importe qui avec n'importe quoi...Le bruit revient.

C'était un retour de vacances pour moi. Un mois de juillet bleu derrière les persiennes, mes valises à peine défaites. Je m'étais assise au bureau, avais allumé l'écran, chasse réouverte, je reprenais docilement mon costume de femme infidèle.
Un peu étriqué, un peu éliminé, qui laissait déjà passer beaucoup trop de lumière et faisait plisser des yeux.

Oh! Je n'étais pas malheureuse, sereine presque. On trouve son équilibre dans les plus improbables grand écart. Il y avait Lui bien sur. Lui car je n'etais pas encore tout à fait moi. Je ne voyais en mes amours féminines que des gourmandises ignorant encore qu'elles étaient et seraient désormais mon unique repas. Lui qui avait déjà parfaitement défait sa valise, replié ses affaires dans l'armoire. Lui et ses 7 années de vie, et ce passé plus solide qu'un roc. Ce passé même pas toujours rose, mais ce n'est pas ce que je lui demandais.
Moi dont l'inconstance a toujours été une donnée intangible, il était une habitude plus que louche...une habitude vitale. Comme on ne sait pas s'attarder, s'émouvoir, s'extasier devant cette paire de poumon fichées dans la poitrine, et qui nous accompagne sans un soupir, je ne m'étonnais même plus de cette présence a mes cotés.
Elle était. Elle était car elle devait être. Point. Certaines évidences sont cruelles. Égoïstes. L'enfant qui martyrise le sein de sa mère n'en reste pas moins innocent, sincère.

Un pied dans ma gamelle donc, et l'autre tâtonnant au loin, sur les sables mouvants, inconsistants, un peu de sperme, beaucoup de mots papillons, aussi tôt dit aussi tôt désincarnés. Des mots, des répliques, des amants...

Un amant... les amants. Je les détestais. Je les accumulais....Était ce par goût du dégoût ?...Se décevoir... On atteint à l'excellence, non? Le réveil...Non, même pas de réveil, le dégoût arrivait bien avant la fatigue, avant le sommeil... Disons plutôt l'éclair de lucidité, entre les bras d'un quasi inconnu... Ne plus s'y reconnaître. Cherchez l'erreur, la faille, le glissement de destin qui nous a fait basculer à l'horizontal. La vie serait elle encore plus lourde à la verticale ?
Certaines caresses, si violentes, si déchirantes, ne peuvent être le fruit du hasard. Ce sont les mauvaises mains, mais les bonnes étreintes.

Qu'ai je cherché dans ces bras? Sans doute à être aimée. A être aimable. Même par le premier venu....Qu'ai je trouvé?...Le premier venu.

L'amertume est passée depuis… Ne reste que les mains en suspends. Des ébauches de geste. Sculpteur sans terre. Je ne regrette pas ces après midi de vent... Certes toutes ces aventures ne m'ont pas..nourrie, mais beaucoup m'ont appris à apprivoiser mon image, mon corps...à l'aimer peut être. Leur désir n'était que ce miroir où apprendre à me regarder. Me dégoûter aussi parfois. Mais peut être est ce le prix a payer pour s'accorder un peu de bienveillance. Je ne regrette pas. Jamais.

J'oublierai vite beaucoup de ces prénoms. Certains papillons mettent des jours et des jours à se créer a l'ombre de leur chrysalide, et une seule journée les voit vivre et mourir au soir....leur vie est elle pour autant inutile? Plus futile que d'autres...
Et puis, ces après midi m'ont appris à désapprendre tant de leçons, à attendre tellement plus....A t'attendre...A te reconnaître.

Mais quand l'heure n'est plus aux amants, à quel cadran s'attarde les après midi?

Il était 15h30 environ à tes premiers mots. Un mardi je me souviens. Un mardi chaud. Nous nous étions déjà croisées sur je ne sais plus quel site où les coups de coeurs se monnaient aux forfaits : 7 jours, un mois, un trimestre... Une réserve à émotions plus ou moins frelatées à portée des doigts. Nous y avions échangé alors quelques banalités d'usage. Il y eut surtout nos profils parcourus, des « j'aime j'aime pas » lapidaires, quelques lambeaux de personnalités jetés en pâture au centre de l'arène et que nous avions flairés de loin.
Tu ne serais pas de tout repos, ce fut ma première pensée. Et j'aimais déjà cette exigence que tu faisais naître en moi. J'aimais cette perspective de devoir ferrailler avec toi, de devoir suivre ta piste... Le « devoir », je nous prédisais déjà sans le savoir l'impérieux besoin qui allait être notre. Celui de se regarder avant même de se voir. Celui de s'ouvrir avant même de donner.

Il y avait ces photos de toi aussi. Du chien t'avais je dit je crois. « Tu as du chien , j'aime ». Avoir du chien...au delà de l'esthétique, cette idée du Beau qui ne se rend pas, ne désarme pas. Je n'aurais pas pu mieux trouver. Je ne savais rien bien sur, rien encore, et pourtant, instinctivement je sentais la myrrhe et l'encens de tes luttes intestines, de tes victoires passées et à venir. Visage de victoire. Beauté victorieuse. Du chien mon Amie! Du chien! Qui vous aboie à l'âme et au coeur.

Et j'aimais cela tu sais. Avant toi. Le tranchant.. L'implacable. Tout ce qui vous souffle et dos au mur vous tient. Je ne croyais qu'aux démonstrations, aux certitudes. Un reste de mon adolescence mal digéré tu crois? Sans doute. Je n'avais pas finit de grandir, je saisissais mal les nuances, je les pensais tiédeur, lâcheté.

Et après? Après cet après midi là? ...D'autres... Celles où j'ai fait mes valises, celles où tu m'as recueillie... Celles où l'on s'est aimées, émues jusqu'aux larmes... Celles où l'on a écrit à quatre mains.. Toutes celles évidentes, où l'on a cru....

Jusqu'à ce matin où le cadran s'est figé sur notre dernière heure, la 1256éme, où ta première et dernière gifle m'a rendu à moi.

Voyage achevé, reposée, je sais aujourd'hui qu'il ne fallait pas de 1257éme heure...
Mais que les 1256 vécues m'ont tout simplement accouchée.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

"C'est fou !"

Anonyme a dit…

C'est toi!